Dans le sillage des réformes engagées par le précédent gouvernement Hollande et notamment la Ministre El Khomri, le gouvernement Macron a transmis aux partenaires sociaux en novembre dernier un document d’orientation avec pour objectif d’obtenir, d’ici février, un accord national interprofessionnel. Parmi les nombreux axes de discussion figure celle de la généralisation et l’extension du compte personnel formation (CPF) mise en place en août 2015. Ce CPF, accessible réellement que depuis 2017 sur un site internet dédié, tente de replacer le salarié au cœur de ses choix de formations et par voie de conséquence, maître de son parcours professionnel.
Or, si l’expérience montre que la Polynésie française s’inscrit généralement dans le mouvement des réformes métropolitaines, avec quelques années de décalage, il n’est pas hors de propos de penser qu’elle sera amenée à instaurer localement un dispositif similaire.
En France, le financement de la formation continue s’appuie historiquement sur l’obligation faite aux entreprises de « former ou payer ». En un mot, soit elles organisent la formation de leurs salariés, soit elles se contentent de s’acquitter d’une taxe destinée au financement de formations dispensées à d’autres travailleurs par un système de mutualisation. Tous les acteurs sociaux s’accordent à dire que ce système avait créé d’importantes inégalités d’accès aux formations entre les salariés et qu’il était plus que nécessaire de proposer un nouveau modèle.
Pour faire suite à l’accord sur la formation professionnelle, conclu le 14 décembre 2013 entre partenaires sociaux, la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale puis la loi El Khomri n° 2016-1088 du 8 août 2016 dite loi « Travail » ont eu l’ambition de répondre à cette exigence de réforme. Désormais, en plus du Compte personnel de formation (CPF), les droits dispersés de formation, de prévention, de la pénibilité et d’engagement citoyen sont regroupés en janvier 2017 en un seul compte, le compte personnel d’activité (CPA).
Même si le dispositif est encore trop récent pour juger de son efficacité, l’esprit de cette nouvelle réglementation propose une véritable innovation. Le Compte personnel de formation (CPF) appartient à la personne active, dès son entrée sur le marché du travail, jusqu’à son départ à la retraite et n’est pas lié au contrat de travail. Ainsi, tout au long de sa vie active, quel que soit l’évolution de son statut (salarié, demandeur d’emploi, en apprentissage...), quels que soient les événements survenant au cours de sa vie professionnelle, ses changements d’employeurs, la personne reprend l’initiative de mobiliser ses droits à la formation comptabilisés sur son CPF. Le dispositif replace ainsi le salarié au centre de son parcours professionnel. Enfin, pour faciliter son utilisation, le compte est accessible sur le site www.moncompteformation.gov
Cette réappropriation était nécessaire et certainement attendue par de nombreux salariés, et notamment les cadres des entreprises. En effet, dans cette conception nouvelle de la formation professionnelle, l’individu se réapproprie pleinement son autonomie et sa liberté dans ses choix de parcours professionnel. L’initiative de la formation n’est donc plus du seul ressort de l’entreprise, mais de celui du salarié qui dispose alors d’une réelle marge de négociation avec son employeur pour orienter sa carrière. Le salarié peut dès alors, s’il le souhaite, associer plusieurs dispositifs permettant de financer sa formation. Pour l’aider dans ses choix et mieux définir ses perspectives d’évolution professionnelles, un dispositif d’entretien professionnel obligatoire, tous les deux ans, destiné à faire le point sur ses besoins et ses aspirations vient compléter l’accompagnement du salarié.
Comme en métropole, les entreprises privées polynésiennes financent elles aussi la formation continue en s’acquittant d’une cotisation sociale mensuelle égale à 0,5 % de leur masse salariale brute. Cette contribution alimente notamment le Fonds paritaire de gestion, Te Pu No Te Ite, chargé par la puissance publique de la formation des salariés à travers différents dispositifs de financement. En partenariat avec le Séfi, cet organisme participe également au dispositif d’insertion professionnelle en faveur des demandeurs d’emploi. Si la Polynésie s’inspire des avancées métropolitaines, il n’est pas improbable de voir émerger dans notre règlementation locale un Compte personnel de formation revisité à la saveur polynésienne.